Retour sur la Soirée départementale jazz « Calvados » à Caen

Soirée départementale Focus Jazz / Le Tympan, Caen, avril 2024. © PJC | Focus Jazz.
Soirée départementale Focus Jazz / Le Tympan, Caen, avril 2024. © PJC | Focus Jazz.

Rappel du principe

Suite à l’invitation du Tympan et du réseau Focus Jazz, la « Soirée départementale » jazz du Calvados a eu lieu jeudi 4 avril 2024. Cette journée a débuté par une table ronde sur le jazz dans le département, dont les participants — peu nombreux mais compétents et impliqués — ont traité du sujet « Un lieu pour le jazz à Caen : une problématique de près de 30 ans ; quelles solutions ? ».

Résumé des propos de la table ronde

>> Intervenant 1 :

« Quelle offre pour répondre à la demande du public caennais en matière de lieu musical et convivial, dont on a pu constater la réalité et l’intensité avec la Yourte du Tympan, un projet hélas vaincu par des considérations de voisinage ? »

>> Intervenant 2 :

« Les musiciens normands ne se déplacent pas suffisamment pour aller écouter leurs pairs en concerts ».

>> Intervenant 3 :

« Cela relève d’un acte citoyen que d’accompagner les initiatives qui, comme cette journée, contribuent à faire émerger les artistes jazz de notre région et à favoriser les projets de création autour de cette esthétique ».

« Pour autant, la question d’un lieu pour le jazz à Caen est un peu une arlésienne, qui risque de mener à un enfermement du public. Ou alors il ne faut pas restreindre ce projet à un lieu assurant uniquement de la diffusion, mais imaginer un lieu qui fasse également de l’accompagnement des artistes. »

>> Intervenant 2 :

« Cette histoire de lieu est un serpent de mer ; il faut noter que ce sont des musiciens qui jusqu’alors ont toujours promu cette idée. Or il manquait un opérateur, quelqu’un qui veuille bien mettre les mains dans le charbon. Le risque est de s’enfermer à des esthétiques, et selon moi il faut voir cela sous l’angle de l’état d’esprit et non sous celui du matériel musical. »

>> Intervenant 4 :

« Je prendrai l’exemple du DOC, à Aurseulles. Un projet qui a connu des débuts difficiles, puis s’est progressivement structuré avec l’arrivée d’une médiatrice, s’est ouvert sur le territoire, a monté des projets en direction des publics scolaires, etc. Cet exemple, donc, démontre selon moi à quel point la médiation représente un levier clé pour toute action culturelle durable.

>> Intervenant 5 :

« Quelle que soit l’esthétique défendue, il faut que les gens, que le public s’approprie ce lieu. »

>> Intervenant 6 :

« Attention à bien prendre en considération le fait que les modes de consommation culturelle ont changé : les gens ne sortent plus ou beaucoup moins, ils consomment à domicile. 

>> Intervenant 1 :

« Je suis étonné de constater que les acteurs historiques du jazz à Caen ne soient pas parvenus à clore le sujet d’un lieu de jazz dans l’agglomération ; le triptyque formation / radio / concerts a objectivement avorté. Pourquoi ? Est-ce dû à un manque de solidarité entre acteurs ? Un défaut de volonté politique ? »

>> Intervenant 2 :

« Un seul lieu caennais a joué ce rôle historiquement : c’était l’Espace Puzzle qui assurait du soutien au spectacle vivant et accueillait à ce titre des projets très variés.

>> Intervenant 7 :

« La question du manque de volonté politique est centrale. Permettez un point sur La Yourte du Tympan : ce projet a fonctionné ; tout ce qu’on a imaginé à ce sujet, l’ambition de créer de l’envie, d’attirer de nouveaux publics, de contribuer à faire que les musiciens formés dans la région exercent à Caen, tout cela a fonctionné. Ce projet de La Yourte, pour mémoire, a concerné 300 musiciens et plus de 2000 spectateurs malgré une jauge de 40 personnes. Il a comblé un manque, avec une répétition par jour toute l’année, avec des jam sessions chaque semaine : cela a contribué à retenir voire à faire revenir à Caen des musiciens qui autrement seraient partis ailleurs, à Tours, à Nantes ou à Paris évidemment ! »

>> Intervenant 8 :

« La question de l’expatriation des musiciens est centrale, car nous sommes très près de Paris. L’exemple des dispositifs mis en place en région Auvergne-Rhône-Alpes par le réseau Jazz(s)RA est très instructif : ils ont mis sur pied de nombreux dispositifs de maintien des artistes en région ; mais aussi de soutien à des lieux de diffusion. Alors bien sûr il existe de fortes différences de territoires entre cette région très densément peuplée et très urbanisée et la nôtre, mais il y a aussi des points communs, par exemple en termes de désenclavement de zones rurales. Le tissu associatif y joue dans les deux cas un rôle essentiel, et cela nous ramène à la question de la volonté politique et du soutien accordé à ces initiative culturelles. »

>> Intervenant 2 :

« Les gens me semblent de plus en plus demandeurs de projets qui leur offrent une expérience musicale globale, ou disons porteuse d’une attractivité globale : des lieux ou structures capables d’assurer une programmation, mais aussi des masterclass, un festival… à l’exemple de ce que propose le Petit Faucheux à Tours. À Caen et plus généralement en Normandie, nous avons du travail sur ces sujets, sur le fait de parvenir à jeter des ponts entre les structures qui travaillent trop isolément.

>> Intervenant 9 :

« De fait, et ceci d’autant plus que les gens ne bougent pas assez, ne sortent plus guère de leur domicile. Cela rend plus difficile encore le lancement d’initiatives qui deviennent à terme des réussites ! »

>> Intervenant 4 :

« Il y a en fait deux questions : celle d’un lieu destiné aux artistes et qui les accueille pour des répétitions, des échanges, des rencontres, … ; et celle d’un lieu ouvert au public, qui assure des missions de programmation, de médiation, de brassage.

>> Intervenant 1 :

C’est cela ! Caen a besoin d’un lieu multifonctionnel permettant l’accueil des musiciens, mais aussi d’un lieu qui permette de brasser les publics : il faut que les acteurs fassent l’effort d’aller vers le public plutôt que d’attendre qu’il vienne.

Visiteur mystère :

C’est clairement dommage qu’il n’y ait pas un lieu d’accueil pour le jazz à Caen ; l’offre est là, elle est intéressante, les projets montrés à la Yourte l’étaient également, je suis d’ailleurs curieux de voir la suite de ce projet. Cela fait que j’espère que le jazz aura un jour un lieu durable à Caen. Mais attention, si on prend l’exemple de Coutances, il ne se passe pas grand chose en dehors du festival ; il faut en être conscient !

 

 

Quelques images des showcases professionnels

Atlantis : Deborah Lennie (voix) | François Chesnel (piano) | Patrice Grente (contrebasse).

Coquelicot : Mathieu Bellon (saxophone) | Julio Andia (guitare) | Apollinaire Bertrand (basse) | Louison Audouard (batterie).

Echoes of the Jungle : Simon Deslandes (trompette) | Samuel Frin (saxophone baryton) | Nicolas Lelièvre (batterie).

Play Station : François Chesnel (piano) | Patrice Grente (contrebasse) | Pierre Millet (trompette).

Concert "Brass Band habitants"